Après nous le déluge

Yvan ROBIN

Atelier in8

  • Conseillé par
    25 septembre 2021

    Yvan Robin, s'il signe son premier roman chez In8 n'en est pas à son coup d'essai, puisqu'il a déjà publié chez d'autres éditeurs. Ce livre est d'une noirceur et d'une force incroyables. C'est l'Apocalypse, le Déluge au sens biblique du terme, celui qui détruit le mal. Les hommes ont mené le monde à sa perte en épuisant les ressources naturelles et croissant immodérément, en se renfermant sur eux-mêmes, sur leurs écrans, en ne s'occupant ni de leurs prochains ni des dégâts irréversibles sur leur lieu de vie. Chacun des sept chapitres commence par une citation du livre de la Genèse -enfin, c'est ce qu'il me semble, j'avoue mes lacunes en ce domaine- concernant chacun des sept jours ou Dieu est censé avoir créé le monde. Le Déluge, Lazare, on croise aussi une Dalila, le Mont d'Airain comme terre promise, pas mal de références aux textes sacrés, et sans doute d'autres que je n'ai pas vues. Il y a aussi du Ulysse qui doit affronter tant d'épreuves pour revoir Ithaque.

    Tout cela écrit dans une langue incroyable, grandiloquente parfois qui pourrait jurer avec l'urgence dans laquelle Lazare et Feu-de-Bois et les personnes qu'ils rencontrent sont. Il y est question de survie, et l'auteur s'amuse avec les mots, intercale des extraits d'un texte intitulé Principe de désacralisation de la vacuité, comme si ce paradoxe finalement nous rapprochait de l'histoire et de ses héros. Difficile à expliquer, mais je me suis senti sans doute plus proche d'eux que si Yvan Robin avait usé d'un langage familier. N'oublions pas les traits poétiques, de ceux que Lazare écrit dès qu'il trouve un crayon et un support. Le père et le fils se répondent dans les paragraphes, l'un auquel l'auteur s'adresse avec un "tu" et l'autre qui s'exprime à la première personne.

    Puis il y a le rythme, soutenu car la survie est à ce prix, il faut être le plus fort et rester humain et lent, au fil des eaux boueuses -et pire sachant que des cadavres d'hommes et d'animaux y résident. Le tout donne un roman noir haletant duquel il est bien difficile de sortir avant le septième jour et autrement qu'en sueur et fortement chamboulé.