Monologue amoureux
Ce roman raconte les confessions d’une concierge discrète qui nourrit un amour inconditionnel pour un enseignant. Pendant quarante ans, altruiste et dévouée, elle vit une passion silencieuse et platonique, observant pas à pas son bien-aimé.
Prisonnière de ses sentiments, béate d’admiration et animée par ses convictions, elle laisse libre court à ses fantasmes chastes, dévouée à améliorer le quotidien d’un être indifférent.
Ce récit explore la frontière entre fiction et réalité, où l’héroïne, incapable d’exprimer son amour, comble sa solitude en se consumant dans une dévotion quasi mystique. Elle se comporte comme un ange gardien obsédé et impulsif, atteignant tantôt l’absurdité, tantôt à la limite de l’imprudence. Cette aventure ne la mène nulle part mais la contente.
Le roman est à la fois subtil et addictif, abordant la résignation, l’espoir et l’obsession d’un amour inflexible et non consommé. Il offre une réflexion fascinante sur la puissance d’un amour non réciproque et la rédemption par la fiction, qui semble parfois plus réelle que la réalité elle-même.
L’écriture soignée de Marco Lodoli donne vie à un texte d’une candeur bouleversante, captivant et unique.
« Plus la distance est grande, plus l’amour doit être fort pour remplir tous ces kilomètres vides »
« …Nous sommes deux fantômes sans corps et sans maison, une éventualité qui reste suspendue dans le champ des possibles inassouvis… »
« Matteo est resté silencieux, mais on pouvait presque entendre le choc des pensées qui s’abîmaient en lui. »
Littérature de poids
"Le Déluge" décrit avec une lucidité frappante un monde au bord du désastre écologique. Sur 30 ans, il brosse un tableau sombre de notre aveuglement collectif et de notre dépendance aux énergies fossiles.
Ce récit dresse une galerie riche et diverse de protagonistes engagés à leur manière dans une lutte désespérée contre les effets dévastateurs du changement climatique.
Utilisant diverses formes narratives, du récit personnel aux rapports institutionnels, l'auteur multiplie les perspectives et explore les conséquences apocalyptiques de notre inaction avec un réalisme saisissant.
L’histoire, fictionnelle et documentaire, capture habilement notre quotidien et les souffrances d’une civilisation propices à la violence et aux maladies. L'auteur, maître dans l'art du détail, dissèque un monde en déclin à travers des scènes saisissantes et des instants marqués de brutalité.
C'est une œuvre imposante qui dissèque nos erreurs, interroge et dessine un avertissement poignant sur les conséquences dévastatrices de nos choix présents, mettant en lumière l'urgence vitale d'une transition énergétique.
Quel destin pour notre espèce dans ce tas de ruines ?
« L’humanité entière restait les bras ballants et regardait, abasourdie, le monde disparaître en se demandant si quelqu’un d’autres allait agir. »
« Comme tant d’autres martyrs, K. a perdu la vie à cause des changements qu’elle demandait. »
« Y a pas mal de nuances de vert sur la terre. »
La science ou la poésie
Un couple parisien dans la quarantaine, comblé par la vie, vit avec leur fille Zoé, âgée de 10 ans. Céline, l’épouse, rencontre par hasard Pierre, un ami d’enfance du lycée. Devenu un hédoniste convaincu de l’éphémère de l’existence, Pierre incarne une vision du monde diamétralement opposée à celle de son mari qui, lui, est ambitieux, productif, focalisé sur le profit personnel.
Perturbée par ces retrouvailles et le mode de vie de son ami, Céline s’interroge sur l’intérêt de défendre sa liberté ou de se laisser porter…. Le dilemme est cornélien entre embrasser la vie pleinement ou aspirer à une forme d’éternité par la technologie…
Roman visionnaire, parfaitement crédible, met en garde le désir à outrance de technologie et de réalité virtuelle jusqu’à imaginer où les esprits numérisés constitueraient un univers artificiel.
Les dialogues sont finement ciselés.
L’histoire, bien que divertissante, laisse une impression d’inquiétude face aux potentielles dérives de notre société moderne.
« Mais l’envie est un sentiment encombrant, et plutôt on s’en libère, mieux on se porte. »
La seule manquant l’appel de l’exode
Premier roman autobiographique qui s’ouvre sur une grand-mère troublée par un bruit étrange qu’elle seule entend. Son petit-fils et sa mère, intrigués, la rejoignent pour en découvrir la source.
Leur enquête les plonge dans l’effervescence du Guéliz à Marrakech, devenant pour eux un pèlerinage à travers le passé et les coutumes de ce quartier.
Ruben Barrouk rend hommage à une époque où le vivre-ensemble entre Juifs et Musulmans avait encore du sens, et ce bruit pourrait incarner la nostalgie d’un temps révolu de paix.
Ce roman, à la fois olfactif et poétique, est un plaidoyer pour la mémoire collective et l’espoir d’une cohabitation retrouvée sur une même terre. Il résonne comme un véritable message de paix, d’amour, d’écoute et de tolérance.
Bien que l’écriture soit parfois emphatique, avec un vocabulaire dense, elle est assouplie par des scènes empreintes d’émotion.
« C’est ainsi que Marrakech, dans sa fuite, laisse derrière elle un bruit. Un bout de ce qu’elle est qui ne veux disparaitre…. Il est la seule chose qui reste quand tout a disparu. Il est la pierre de ma grand-mère »
« Peut-être nous disait-elle qu’elle entendait le bruit pour nous dire, à nous, qu’elle n’entendait pas encore le silence. »
La gare du pays des merveilles
En 2022, l’auteur entreprend un road-trip avec sa mère pour percer le mystère entourant deux jeunes allemandes qui ont choisi de s’installer dans leur petit village du Cantal en 1977. Cette présence énigmatique a suscité la curiosité des villageois, donnant lieu à des ragots, des fantasmes et multiples suppositions.
A travers une narration alternant trois époques, Pauline Clavière réussit brillamment à décrire sa relation avec sa mère, l’histoire de son grand-père marquée par les non-dits du STO, ainsi que l’encrage à la terre et à la nature, la vie du village. Progressivement, elle dévoile les évènements et la véritable raison de la venue des deux jeunes femmes dans ce hameau.
Les personnages, particulièrement attachants, rendent cette histoire passionnante et émouvante, captivant le lecteur par ses révélations jusqu’au dénouement, construit de manière épistolaire.
« Ma mère est de cette espèce qui met un point d’honneur à faire de chaque déviation un évènement. »
« Les seuls à être restés dans ce trou sont ceux qu’ont pas trouvé la gare. »
« L’arrivée de deux étrangères au hameau a changé jusqu’à la consistance de l’air. »